Bulletin d’information
Numéro 7 – Décembre 2021
Résultats de l’Enquête sur la mortalité des colonies d’abeilles au cours de l’hiver 2020-2021 pour la région Grand-Est.
Cette année, l’enquête de mortalité régionale a été mutualisée avec l’enquête nationale sur la mortalité hivernale des colonies d’abeilles menée par plateforme d’Epidémiosurveillance en Santé Animale (ESA), ceci afin de réduire le nombre de sollicitations et d’augmenter le taux de réponse. Les enquêtes de mortalité, reconduites chaque année, permettent de fournir une estimation de la mortalité hivernale, d’effectuer son suivi d’année en année et de recueillir l’avis des apiculteurs sur les causes sous- jacentes qu’ils suspectent. Les premiers résultats nationaux sont disponibles sur la plateforme : www.plateforme-esa. fr. Nous vous proposons ici un zoom sur les données de la région Grand Est.
Définitions
Par soucis de clarté nous regroupons sous le terme ruche : les colonies, les essaims et les nucléi. Nous appelons pertes, les ruches considérées comme mortes, faibles, bourdonneuses ou accidentées.
Protocole
L’enquête a pris la forme d’un questionnaire envoyé à l’échelle nationale aux 65 752 apiculteurs ayant déclaré leurs colonies en 2020 et qui ont accepté d’être contacté par mail. Les apiculteurs avaient la possibilité d’y répondre en ligne du 30 mars au 3 mai. Dans le Grand Est, ce sont 7970 apiculteurs qui ont été sollicités pour un total de 2077 participants. Parmi les réponses reçues, 1917 étaient exploitables pour les analyses.
Participation des apiculteurs
Pour la région, le taux de réponse à l’enquête nationale, en baisse depuis 2018, est à nouveau en hausse en 2021 avec un taux de participation de 24% (Figure 1). Il varie de 20% à 30% selon les départements
Figure 1 : Evolution de la participation des apiculteurs à l’enquête de mortalité, dans le Grand-Est.
Nous tenons à remercier celles et ceux qui ont répondu à ces enquêtes, utiles à plus d’un titre, ainsi que l’ADA Grand Est et les membres du groupe de suivi ENMHA de la Plateforme ESA pour leurs contributions à cet article. D’autres enquêtes vous seront proposées sur les différentes pratiques et nous vous remercions par avance de l’intérêt que vous y porterez. Il est important de partager les points de vue, afin que tout le monde puisse progresser dans le même sens.
La figure 2 montre que le taux de participation est sensiblement plus élevé chez les apiculteurs possédant moins de ruches (≈ 24%), comparé aux apiculteurs possédant 50 ruches et plus (≈ 18%). Le nombre total de ruches évaluées, qui était à la hausse depuis 2018, a baissé cette année. Il est de 27 924 ruches (Figure 5) contre 39 116 l’année précédente, d’après les chiffres de l’enquête régionale cette année-là.
Figure 2 : Participation des apiculteurs à l’enquête de mortalité 2020-2021, par taille d’exploitation et par département, dans la région Grand-Est.
Pertes hivernales 2020-2021
En considérant les apiculteurs individuellement, nous pouvons constater, figure 3, que :
– 1/3 des apiculteurs n’ont subi aucune perte.
– 1/3 des apiculteurs ont subi moins de 30% de perte.
– 1/3 des apiculteurs ont subi plus de 30% de perte, dont 5% la totalité.
La figure 4 montre plus en détail le taux de perte moyen par département et par taille d’exploitation. Gardons à l’esprit que le taux de perte moyen par rucher fluctue énormément dans les petites exploitations. Par exemple, un apiculteur possédant deux ruches et en perdant une, a un taux de perte de 50%.
Figure 5 : Suivi du taux de ruches perdues au cours des hivernages entre 2017 et 2021, dans la région Grand-Est. Les chiffres sont présentés en pourcentage. La catégorie Non-valeurs regroupe les ruches bourdonneuses, trop faibles ou accidentés (Source des données : ADA Grand Est de 2017 à 2020 et ENMHA en 2021).
Au cours de cet hivernage (figure 5), la région accuse une perte de 22% de son cheptel toutes causes confondues, soit un p des pertes par rapport à a moyenne calculée sur les données régionales des quatre dernières années. Plus précisément, nous observons une hausse de 3 points des ruches mortes et une baisse des ruches non-valeurs de 1 point.
Tableau 1 : Estimation des causes liées aux pertes de ruches lors de l’hivernage 2020-2021 pour la région Grand-Est, par ordre d’importance.
N.B : Il était demandé aux apiculteurs de classer les trois principales causes de pertes hivernales dans leurs ruchers parmi une liste.
Parmi les répondants, 14 % estiment avoir observés des pertes anormalement élevées au cours de l’hiver 2020‐2021, dont 57 % possédant moins de 10 ruches, 34 % possédant entre 10 et 49 ruches et 9 % plus de 50 ruches. Le tableau 1 en détaille les causes des pertes suspectées par les apiculteurs.
La faiblesse des colonies au moment de la mise en hivernage est, selon les apiculteurs répondants, la principale cause des pertes hivernales, loin devant les conditions météorologiques et les problèmes de reine. Des colonies faibles lors de la mise en hivernage peuvent avoir plusieurs causes qu’il est parfois difficile d’identifier. Parmi les plus courantes, on retrouve :
‐ L’action du varroa sur la colonie (abeilles affaiblies, perte d’immunité…).
‐ Les carences alimentaires (eau, pollen, nectar) engendrant un déséquilibre entre les différentes castes d’abeilles. Cela peut être lié aux conditions météorologiques ou à un mauvais emplacement du rucher.
‐ Une baisse de la ponte due à une reine âgée.
‐ Les contaminations chimiques (pesticides).
Une part non négligeable des apiculteurs n’a pas pu identifier clairement les raisons susceptibles d’avoir engendrées la perte de leurs ruches. Une meilleure formation des apiculteurs devrait pouvoir limiter ce problème tout en limitant les pertes sur la région. Ces formations devraient être ciblées prioritairement sur le varroa et les besoins alimentaires de la colonie tout au long de l’année. Parmi les causes les moins fréquemment citées, nous retrouvons :
– Les attaques de guêpes
– L’intrusion de rongeurs dans les ruches
– L’usage de pesticide contre le scolyte
– Un mauvais emplacement d’hivernage
– Le pillage en automne
– Des ruches en mauvais état
– Le vandalisme et le vol de ruche
– Les problèmes d’assemblage des colonies
– Le renversement par des mammifères
– Les perturbations de la grappe
Impact de la crise sanitaire liée au Covid19
Environ 5% des apiculteurs ont déclaré avoir rencontré des difficultés à visiter et entretenir leurs colonies en raison des confinements successifs, des limitations de déplacement, d’une hospitalisation et/ou de l’arrêt des formations apicoles. Il est possible que ces limitations aient engendré une augmentation des pertes au sein de leur rucher. La crise sanitaire a pu jouer un rôle dans l’augmentation des pertes observées cette année. En effet, sur l’ensemble des ruches appartenant à des apiculteurs ayant déclaré avoir rencontré des difficultés en raison du covid, 18.5% ont été perdues, contre 14% sur l’ensemble des ruches appartenant à des apiculteurs ayant déclaré ne pas avoir été impactés.
Nos conseils pour s’assurer un bon démarrage aux printemps prochains sont les mêmes que ceux donnés lors du bilan de l’enquête sur les pertes hivernales de 2020 dans le Grand Est. Vous pouvez retrouver sur le site de l’ADAGE, onglet Ressource > Documents à télécharger > enquêtes pertes hivernales ou en cliquant : ici. Cet article vous présentera également les taux de mortalité en fonction des traitements utilisés pour l’hivernage 2020.
1.Hivernez des colonies, correctement déparasitées, en utilisant des produits ayant une AMM pour les abeilles (tout autre produit est interdit).
2. Procédez au traitement au plus tôt, de manière à ce qu’il soit terminé en août/septembre. Il faut savoir que les dernières naissances ont lieu autour d’octobre en Grand Est (Imdorf 2010).
3. Respectez scrupuleusement les durées d’application et les doses indiquées par le fabriquant. Des stratégies complémentaires peuvent aider à éliminer ce parasite (Consulter le Mémento de l’apiculteur).
4. Vérifiez l’état d’infestation et la réussite de ces interventions avec un comptage des varroas sur un lange graissé. Le traitement ne garantit pas que vos ruches soient suffisamment déparasitées (interactions avec des facteurs climatiques défavorables ou des épisodes de ré-infestation…).
5. Le contrôle sanitaire avant hivernage doit être méticuleux afin de détecter les colonies bourdonneuses et les colonies faibles, voire malades, qui ne passeront pas l’hiver.
6. Effectuez un nourrissement correct, avec de bons produits, que les abeilles assimilent facilement et qui contiennent le moins de résidus secs possibles. Il faut nourrir également très tôt car les nuits fraiches, voire froides, à l’automne ne sont plus propices au bon stockage des provisions.
7. Par les bonnes pratiques apicoles, il est indispensable de mener une prophylaxie tout au long de l’année, changements de reine, stimulations, choix d’un site d’hivernage bien exposé…
Nous remercions les apiculteurs qui ont répondu à cette enquête. Plus vous êtes nombreux à participer, plus les données recueillies sont représentatives de la situation de la filière apicole régionale et plus nous pourrons cibler efficacement les actions de formations et d’informations à mener dans le but de limiter les pertes et d’améliorer l’état sanitaire du cheptel, aussi bien à l’échelle régionale qu’à l’échelle individuelle.
Pour participer à l’enquête de mortalité, pensez à indiquer chaque année lors de votre déclaration de ruches, que vous acceptez d’être contactés par courriel et communiquez tout changement de votre adresse électronique.